Altesse, Monsieur le Wali de la Wilaya de Tanger Tétouan,
Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, chers
invités.
L'honneur me revient de vous parler au nom de mes amis d'AI
Boughaz pour situer ce colloque dans le contexte général
de nos activités.
Permettez moi tout d'abord de vous exprimer combien nous sommes
heureux de vous accueillir, si nombreux, dans ce beau bâtiment
"historique", que nous avons préféré
à d'autres édifices modernes offrant sans doute
plus de confort.
De vous remercier d'avoir répondu à ce nouvel
appel de Tanger. Un appel très fort puisque il y a
parmi nous des personnes venues de très loin, partager
avec nous leurs réflexions sur cette ville que nous
aimons tous et qui n'en finit pas de nous charmer et de charmer
ses nouveaux visiteurs. Je me réfère bien sûr
aux intervenants mais aussi à ces participants qui
nous ont fait la surprise de répondre spontanément
à l'annonce du programme sur les sites Internet de
nos amis Oussama Zekri et Louis Benzaquen ou sur la revue
Malabata de notre ami Oleg Vargas (qui est avec nous dans
la salle, avec Mme Keyeux qui vient de Belgique et Mr Manouzi
qui vient du Quebec).
Je vais saisir cette occasion pour abuser un peu de votre
patience et vous présenter très brièvement
l'association AI Boughaz, dont les premiers balbutiements
ont eu lieu en 1986 et dont l'existence légale (et
officielle) démarra à partir de 1988.
La seule ambition des fondateurs d'AI Boughaz était
de se mettre au service de la défense des intérêts
de leur cité et de l'amélioration des conditions
de vie de leurs concitoyens, loin de toute ambition politique
et dans le respect des croyances religieuses de ses membres.
Contribuer au développement économique, social
et culturel de Tanger en préservant ses spécificités
multiculturelles de ville symbole de convivialité et
de tolérance, et respecter l'âme et la mémoire
des lieux, constitue le principal objectif d'AI Boughaz.
De nos jours nous préférons parler de développement
"harmonieux" et "durable".
Aussi pour mieux se positionner dans le paysage associatif
régional et national, AI Boughaz organisa en mars 1990
sa première "Rencontre" autour du thème
de " Tanger, Horizon 2000... quels avenirs alternatifs
". Ayant réunis les Tangérois autour de
personnalités importantes, dont Moulay Ahmed Alaoui,
Feu Michel Jobert, José Maria Figueras et Abdelmalek
Cherkaoui, ses travaux avaient permis d'aboutir à des
recommandations dont en particulier :
- le développement des établissements de l'enseignement
supérieur pour faire de Tanger un véritable
centre universitaire à l'instar des autres grandes
villes du royaume ;
- la création d'une " Zone Franche Financière
" ;
- la création d'une " Agence Urbaine " ...
AI Boughaz défendait par ailleurs le projet de création
d'un port d'éclatement sur la façade atlantique,
entre le cap Spartel et Asilah, pour apporter une solution
à l'engorgement du port actuel, déjà
considéré comme enclavé dans la médina
par le premier schéma directeur du début de
l'indépendance.
Avec des sections à Rabat et à Casablanca, réunissant
des personnalités importantes, et des antennes à
l'étranger, l'association gagnait en crédibilité
et en audience.
En associant les autres associations de la ville à
ses projets et en s'appuyant sur les associations de quartiers,
les activités développées touchent à
tous les domaines
depuis les actions de sensibilisation en faveur de la protection
de la forêt et des parcs naturels, jusqu'aux campagnes
de propreté, ou aux visites guidées en passant
par des distributions de matériel pour handicapés
ou des séminaires, des conférences et des expositions.
A titre d'exemple, la distribution des prix aux meilleurs
élèves de tous les établissements scolaires
de la ville est devenu une tradition.
Par ailleurs avec le soutien financier des sponsors qui croient
dans nos dossiers et la collaboration technique de l'Agence
Urbaine, avec qui nous avons signé une convention de
partenariat, de l'Inspection des Monuments Historiques et
des services de la Wilaya et de la Commune, nous réalisons
de petites actions de restauration.
Mais l'engagement d'AI Boughaz dans des dossiers sensibles
en faveur de la défense du patrimoine tels que :
- l'extension de la Zone Franche Portuaire qua devait se réaliser
au détriment de la partie la plus fréquentée
de la plage municipale ;
- le classement du Grand Hôtel Villa de France ou du
site archéologique de Zilil ;
- la récupération du Gran Teatro Cervantes ;
- la préservation du part naturel d'Agla ou Rmilat
ou Perdicaris ;
- nos engagements aux côtés de nos amis de la
Fondation Tanger AI Madina au niveau de la réhabilitation
de la ville intra-muros et des questions urgentes comme le
danger d'écroulement de la muraille de la Qasbah, de
Bab el Bhar et York Castel ;
- ainsi que le dossier élaboré en 2001 sur la
vision de la société civile de Tanger sur sa
ville, réalisé en collaboration avec 5 autres
associations ou la lettre collective sur les nouveaux plans
d'aménagement signée conjointement avec 27 associations,
ont fini par faire de l'association AI Boughaz l'un des principaux
défenseurs du patrimoine aux yeux de la population.
D'autant plus que la liste du patrimoine élaborée
en 1992 et détaillant pas moans de 400 sites ou bâtiments
devenait une sorte de cheval de bataille de l'association.
(voir annexe)
A elle seule cette liste mériterait la mise en place
d'un groupe de travail spécifique car la faire reconnaître
officiellement serait un atout majeur dans la concrétisation
d'une véritable démarche en faveur de la sauvegarde
du patrimoine de la ville. Elle pourrait définir le
cadre global dans lequel s'inscriraient toutes les initiatives
sans risques d'interférences.
D'autant plus que nous constatons de plus en plus une crise
d'identification de la population avec la ville par manque
de repèrres et de références.
Comment aider cet ouvrier du sud du pays qui vient travailler
dens une nouvelle unité industrielle à Tanger
à s'identifier à sa nouvelle ville, à
tisser de nouveaux liens avec elle ?
Mais de quelle identification devrons nous parler quand nous
constatons que la population est passée d'environ 150.000
habitants vers 1950 (dont 20.000 espagnols, 15.000 juifs,
7.000 français...) à près d'un million
aujourd'hui avec à peine quelques milliers de non marocains-musulmans
?
Que penser quand un jeune cadre habitant Dar Baroud depuis
plus de trente ans vous confie après une visite guidée
de la médina n'avoir jamais mis les pieds à
Borj es Salam, ou, dit autrement, le parking de l'hôtel
Continental ?
Que penser quand un autre réagit au théme du
présent colloque avec un ton ironique en ces termes
: " Tanger, un patrimoine mondial ? " "ba'sh"
(en français "avec quoi" ?) ?
Devant ces attitudes devenues fréquentes, il y a heureusement
aujourd'hui ce nouvel engouement des étrangers pour
Tanger, sa médina et ses beaux quartiers, comme le
Marshan ou la Vieille Montagne, qui véhicule un regain
d'intérêt pour l'entretien et la réhabilitation
des espaces.
Mais Tanger, grâce à la sollicitude que lui accorde
Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu Le Glorifie,
est devenue un véritable chantier, une région
en plein développement et intéressant de plus
en plus les investisseurs nationaux et étrangers.
Les infrastructures de base et les conditions d'accueil s'améliorent
mais l'habitat aussi se développe et la ville grandit
anarchiquement. De nouveaux plans d'aménagements seront
bientôt en place et des organismes comme l'Agence Urbaine,
l'Inspection de l'Aménagement du Territoire et surtout
un nouveau Wali mobilisant toutes les potentialités
de l'administration essayent de mettre de l'ordre dens tout
cela. Mais est-ce suffisant face à une certaine forme
d'inconscience collective en matière de préservation
du Patrimoine ?
Toute la partie ancienne de Tanger avec sa médina sont
à préserver diront les participants au séminaire
organisé par ICOMOS (Conseil international des Monuments
et des Sites) réunis à Tanger le 20 aural 2002,
à l'occasion de la Journée Mondiale du Patrimoine.
Alors qu'ils se proposaient de repérer seulement quatre
ou cinq espaces intéressants.
D'où à notre sens, l'importance de ce colloque
dens notre démarche en faveur de la sauvegarde du "
Patrimoine TANGER ".
Au delà de notre sensibilité pour la dégradation
du cimetière pour animaux ou du café Hafa, qui
se transforme progressivement en gargotte. Malgré notre
impuissance face à l'envahissement des grottes d'Hercule,
la déforestation du parc naturel de Perdicaris et au
risque d'écroulement de la muraille de la Qasbah pour
ne citer que quelques drames.
Essayons ensemble d'imaginer de nouvelles solutions nous permettant
de dépasser les blocages actuels pour gagner du temps
au temps.
"TANGER, un Patrimoine Mondial", il faut y croire.
Avant de conclure je tiens à vous présenter
nos invités même si pour la plupart vous les
connaissez. Je tiens aussi à vous faire part des excuses
des invités pressentis au départ qui souhaitaient
être associés à nos travaux mais qui ont
été empêchés de se joindre à
nous par leurs obligations professionnelles. Ces excuses sont
aussi courtoises les unes que les autres mais je tiens tout
particulièrement à donner lecture de celle qui
nous est adressée par notre ami Abdelmalek Cherkaoui.
II s'agit d'un petit poème dédié à
Tanger.
MERS ABSOLUES
ELLE EST PLUS DOUCE QUE L'EAU
ET PLUS LIMPIDE QUE LE RUISSEAU
QUAND TANGER EST EN FLEURS.
DANS CES RUELLES D'ÉTÉ
DÉDALES PERDUES
J'AI PASSÉ UN BEAU LAPS DE TEMPS
ET JE SUIS PARTI.
TANGER, IL FAUT L'AIMER
ET PUIS S'EN REMÉMORER.
AVEC MODESTIE
SANS REGRETS,
ET SANS ARRIÈRES PENSÉES.
ET PUIS APRÈS, QU'IMPORTE
TOUT TANGER C'EST DEMAIN
C'EST L'AVENIR
C'EST LA JEUNESSE
ET C'EST L'AMITIÉ NOURRIE.
MAIS QU'AI-JE FAIT ?
QUEL CRIME ?
POUR AVOIR DANS LA POITRINE
UNE PETITE DOULEUR,
ET DES CHANSONS
DANS TOUS LES COINS DE RUE.
DEUX MERS SI BLEUES,
SI BLEUES,
QUE C'EST DOMMAGE
QU'ELLES RESTENT SI LONGTEMPS
OUBLIÉES.
BRASILIA, 26/6/2002
Pour terminer je tiens à remercier tous ceux qui se
sont investis avec nous dans l'organisation de ce colloque
:
- S.A. Lalla Fatima Zohra qui continue à soutenir et
à présider toutes nos activités ;
- Monsieur Mohamed Halab, notre Wali, qui s'est mobilisé
dès son arrivée en faveur de la renaissance
de Tange ;
- Jean Luc Larguier et toute l'équipe de l'Institut
Français de Tanger Tétouan ;
- Nos sponsors sans le soutien desquels nous n'aurions pas
pu vous recevoir ; ?
- Les représentants de la presse qui ne ménagent
aucun effort pour faire échos de nos activités
et les porter à la connaissance du public ;
- Les membres du comité d'organisation et les membres
de l'association AI Boughaz ;
- Toutes les personnes qui ont contribué de près
ou de loin à l'organisation de ce colloque.
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