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Christine
KEYEUX-SCHNÖLLER

Christine
KEYEUX-SCHNÖLLER, plasticienne et ancienne Tangéroise,
résidant en Belgique, anime, grâce à laide
de lAssociation Tangéroise Al Boughaz et de nombreux
bénévoles, artistes, enseignants, parents et autres,
un atelier papier « Si Tanger métait conté,
la fabuleuse histoire dIbn Battouta » 200 enfants
de différentes écoles et quartiers de la ville y
participèrent. Ils racontèrent à leur façon
, par la technique du collage, avec des papiers venant de partout,
les pérégrinations de ce personnage hors norme,
au regard ouvert sur le monde.. Leurs travaux mis bout à
bout (plaque de 30x40 cm) faisaient 42 mètres de long.
Ils ont été monté en 6 grands tableaux, débordant
de lumière et de créativité. Mémoire
dautrefois, zone franche retrouvée, temps où
Tanger habité de diverses nations chantait sa multiculturalité
?
Lhomme
a eu recours au papier afin de sauver son art de loubli
et den préserver la fidélité. Christine
Keyeux a fait le chemin inverse, elle a donné au papier
sa musique propre en lhabillant de formes et de tons offerts
à la vue. Plutôt quune revanche de la matière,
jy vois un désir de conférer au papier une
vie nouvelle, succédant à sa vocation de fixer le
son, la lettre et lesprit, puis à lobligation
où il sest trouvé longtemps confiné
dans un monde utilitaire tenu au ban de lémotion.
Triste papier, matière besogneuse pour laquelle, hors de
ces servitudes, point de salut autre que lissue fatale dêtre
confié à la broyeuse, au pilon ou au feu, à
moins de trouver un ultime refuge sous la poussière des
bibliothèques. Enfin, Christine vint, libérant lanonyme
pelure végétale de lasservissement ancestral,
lui ouvrant enfin les portes de lunivers précieux
et inutile dune beauté chatoyante. A lorée
de sa troisième vie, le papier a cessé de ramer,
il se fait tableau, bijou, ornement, il coule des jours heureux,
et il ne perd pas pied.
Lotfi Akalay
Jai
été élevée à Tanger, ville
imprégnée de lambiance internationale
qui y régnait. A lécole nous fréquentions
des dizaines de nationalités différentes. Dans
la rue nous entendions parler arabe, français, espagnol,
italien, anglais
En famille nous fêtions les uns
avec les autres nos fêtes respectives, musulmanes, juives
ou chrétiennes. Lodeur du couscous, du pain azyme,
de la paëlla et de la dinde rôtie se mêlait
aux chants de Noël, aux bruits des castagnettes ou des
mélopées locales. Les appels à la prière
du haut des mosquées, se joignaient aux sons des cloches
des églises. La seule frontière que nous connaissions
était la frontière du Maroc espagnol, et elle
nous paraissait dérisoire
. La ville elle-même
était un mélange de styles différents
.
Cétait normal et notre quotidien à nous
les enfants de Tanger, des années 1950/60.
Nous
pensions que le monde était ainsi : un livre ouvert
où chacun avait sa page
.Il nous fallut affronter
les dures réalités de lexil pour réaliser
que cétait loin dêtre le cas, que
cette terre de tolérance et de multi-culturalités
qui nous avait vus grandir était une exception, que
ce que nous avions vécu était un acquis incroyable.
Je suis retournée à Tanger, fin juin 2003. Avec
le soutien de Al Boughaz, Association locale qui défend
le patrimoine de Tanger, tant culturel quarchitectural,
jai animé un atelier « papier » Celle-ci,
par lintermédiaire de son président Rachid
Taferssiti, a subsidié et encadré le projet
avec laide de nombreux bénévoles (artistes,
enseignants, parents). Nous sommes partis de lhistoire
d Ibn Batouta né à Tanger en 1304 , qui
parcouru le monde pendant 29 ans de 1325 à 1354.
« Il revint chez lui enrichi, non pas de pièces
dor ou de pierres précieuses, mais de ce qui
fait la richesse du voyageur : la mémoire. En un temps
où les livres étaient fort rares, il fit de
ses périples des histoires qui captivèrent ses
auditeurs. Leur faisant emprunter des routes écarlates
qui ouvraient une fenêtre sur le monde .Les mots devinrent
des bateaux, à bord desquels il sillonna des mers couleurs
de paon avec ses amis et leur fit découvrir des horizons
nouveaux »(Le Fabuleux Voyage dIbn Battuta, James
Rumford, SYROS jeunesse 2001). Les enfants venaient des différentes
écoles de la ville, beaucoup de la Médina, ils
racontèrent à leur façon lhistoire
de ce grand voyageur qui fut le premier à répertorier
les pays Islamiques de lépoque, et dont les voyages
furent fabuleux.
La technique employée était le collage. Javais
prévu un maximum de 80 enfants, il en est arrivé
200 ( de 5 à 12 ans) ; laprès-midi ils
revenaient avec les cousins, les frères, les surs.
Javais apporté des papiers de tous les coins
du monde
Nous avons vite été à court.
Nous avons continué avec des serviettes en papier.
Ce que ces enfants ont fait est extraordinaire
. Cest
plein de bleu, de mer, de ciel, de soleil, de jardins remplis
de fleurs, darbres plein de fruits
Dhumour
Le
monde comme on le rêve
Je suis encore éblouie
de toute cette lumière
Ils ont réalisé
240 travaux dont 180 (faute de matériel) ont pu être
assemblés. Ce fut un travail titanesque. Nous avons
travaillé 15 jours pour tout monter. 18 panneaux qui
mis bout à bout faisaient 42 m de long. Nous en avons
fait 6 grands tableaux. Le tracé du voyage dIbn
Batouta a été écrit avec le nom des enfants
qui ont participé. Le tout a été exposé
au musée dArt Contemporain de Tanger. La fierté
des enfants et de leurs parents faisait chaud à voir
.
Ces enfants, étaient débordants de créativité.
Certains navaient même pas de place pour mettre
leur travail sur la table, peu importe, ils travaillaient
sur leurs genoux. Ils ne voulaient pas sarrêter.
Latelier terminé, ils maccrochaient dans
la rue pour me demander « Quand est-ce quon recommence
? » Les parents me remerciaient
.Je pense souvent
au désir de ces enfants, à leur écoute,
à lattention quils apportaient à
la moindre explication
.à leur imagination.
Il a suffit dun tas de papier, dun peu de colle
et dune immense envie de faire.
Août 2004
Jaime
le papier pour ses multiples possibilités. Dapparence
fragile, il peut se transformer à linfini jusqu'à
devenir une véritable écorce. Il se teint,
se plisse, se froisse, se moule, se modèle au gré
de ce que lon veut en obtenir
Il simprègne
des différentes cultures quil traverse, et
donc de notre histoire. Comme le bijou qui de tous les temps
fut un signe de Parure, il possède sa propre individualité
pour acquérir une fonction . Ses fonctions les plus
diverses meublent notre quotidien
..Il devient serviette,
papier cadeau, livres, cahiers,feuilles
.et pourquoi
pas bijoux
.Lart est là pour secouer nos
habitudes, la matière devient précieuse par
le sens quon lui donne et les formes quon lui
inspire. Jutilise différentes techniques, le
filage, le tressage, le collage. Pour les bijoux le papier
utilisé est résistant à lhumidité
et à la lumière, ils sont souvent recouverts
dune couche de vernis naturel à base décorce
dorange. Pour les tableaux, différents papiers,
souvent Japonais, teint avec des pigments. Il ny a
jamais dinduction de couleurs. Celle-ci est dans la
masse ou obtenu parfois par superposition de différents
papiers.
Vagabond
Art
Créatrice
de bijoux - CV
Créatrice
de bijoux - réalisations
2004
- L'année Ibn Batouta
Le
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